• L'espèce humaine... et moi

    par Jean-Jacques VOLLMER

    31 juillet 2023

     

    L'Homme fait partie du règne animal, et l'espèce humaine est avant tout une collection d'individus qui me ressemblent terriblement, ce qui entraîne deux conséquences :

    • Le rôle premier d'un individu, c'est de participer à la pérennité de l'espèce. En ce sens, l'espèce, en tant que « tout » constitué, ne s'intéresse pas au devenir de chacun de ses constituants, tout comme un être vivant complexe, tel qu'un animal, ne s'intéresse pas à ce que font ses cellules. Nous voyons souvent à la télévision des navires de pêche qui rejettent à la mer des milliers de poissons morts parce qu’ils ne sont pas aux normes, et je me suis demandé quelle était la valeur de la vie d'un seul de ces poissons, en quoi il pouvait bien se différencier fondamentalement de tous les autres dans cette masse, et en quoi cela pouvait avoir la moindre importance. Vu de cette manière, même si le « Nous » a besoin des innombrables « Je » pour exister, un individu précis n'a aucune valeur en soi. Bien sûr, une analogie n'est pas une démonstration, et des chercheurs ont essayé de théoriser plus rigoureusement cette approche, à l'image de Richard Dawkins dans son ouvrage : « Le gène égoïste ».

     

    • On oppose souvent à cette vision le fait que l'espèce humaine est sans doute beaucoup plus qu'une collection d'individus interchangeables, notamment par les capacités cognitives, l'intelligence de chacun d'eux, et le fait que ce sont des êtres conscients. Elle serait une sorte d'émergence supérieure du règne animal. J'ai des doutes sur cette question, arguant du fait que, intelligence ou pas, lorsque les individus sont en grand nombre, ils obéissent toujours aux lois statistiques. Par exemple un flot de voitures sur une route obéit aux équations de Navier-Stokes régissant le comportement des fluides, et n'a que faire de l'intelligence des conducteurs qui sont au volant. Il en va de même pour le résultat des élections : quand deux concurrents restent en lice, on est généralement proche d'un résultat 50 – 50, exactement comme si on avait tiré au hasard un grand nombre de boules noires et blanches dans un sac, indépendamment des programmes défendus par les candidats.

     

    Certes, cette manière de voir les choses est en premier lieu fort matérialiste, mais en rien pessimiste. Elle essaie juste de remettre l'Homme à sa place dans le monde, au lieu de le hisser sur un piédestal en raison de ses qualités individuelles qui n'ont pour résultat que de tracer le chemin qui mène à la destruction de l'espèce au lieu de la perpétuer sereinement.

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 4 Août 2023 à 21:54

    Bonjour J.J.

    Je ne suis pas d'accord avec la comparaison d'un flot de voitures avec l'écoulement d'un fluide comme une rivière. Le fluid obéit à quelques lois que je ne préciserai pas ici. Un flot de voitures est plus compliqué, avec des conducteurs pas vraiment identiques: certaiins sont bien sages, d'autres excités,il y a des arrêts pour les repas ou pour les toilettes, des travaux sur le voie de temps en temps, des accidents qui immobilisent tout le monde etc... Bref, ton identification des humains à des robots, fort heureusement, n'est pas valable, à mon avis.

    De même, il y a des élections qui ont des résultats loin du 50-58. Penses aux présidentielles de De Gaulle, et celle de Macron en 2017 qui s'est finie pae 66% 34%;, et et même la derniièe: 58% contre 42%.Il me semble que tu minmalises trop les réactions humaines, qui selon moi sont guidées par le "libre arbitre" (je ne parle pas ici des dictature)

    2
    Pierre M.
    Jeudi 10 Août 2023 à 23:52

    Reprenant la démonstration à l’envers.

    1) Oui les flots de voitures, tout comme les queues dans les supermarchés obéissent à des lois statistiques assez complexes, bien connues des experts, la théorie des files d’attente. Elle est utilisée notamment pour déterminer le nombre optimal de caisses à ouvrir, pour réguler la circulation sur les autoroutes (en modulant en temps réel la vitesse maximale autorisée, afin de supprimer les « coups d’accordéons » très chronophages). Quand bien même l’individu se croit libre de son choix, il est en fait statistiquement et collectivement déterminé. Dépassant le cadre de cet exemple de files d’attente, on peut se demander quel est le libre arbitre d’un libre individu dans une libre société.

     

    2) Dogmes religieux à l’appui, nous nous sentons autres que les autres êtres vivants. Dans notre façon de penser et de vivre le monde qui nous entoure. Que savons-nous de ces autres ? Nous savons pourtant que même un animal peu évolué comme la tique a conscience du monde qui lui est proche (l’Umwelt défini par von Uexküll). Est-il capable d’individuation ? Sans doute pour un chien, un chat ? Mais les autres ? N’est-il pas prétentieux d’interpréter notre différence comme une supériorité ?

    Comme l’écrit Jean-Jacques, « le rôle premier d'un individu, c'est de participer à la pérennité de l'espèce ». Au prix souvent du sacrifice de sa vie. Cette pulsion sacrificielle n’est pas l’apanage des êtres humains, on la retrouve jusque dans les colonies d’êtres unicellulaires (amibes acrasiales par exemple) Spinoza allait plus loin, qui voyait dans le conatus l’effort de toute chose pour persévérer dans son être.

     

    3) Pour conclure, je ne voudrais pas que les considérations précédentes banalises le statut de l’être humain. Comme l’écrivait un sociologue canadien dont j’ai oublié le nom : « No one is indispensable. Everyone is irreplaceable ». Chaque individu qui disparaît c’est une bibliothèque qui brûle dit-on en Afrique.

    3
    Pierre M.
    Vendredi 11 Août 2023 à 00:03

    J'ai oublié, s'agissant de "la valeur de la vie", qui ce concept n'a pas échappé au calcul des économistes qui ont développé plusieurs méthodes pour la calculer en termes monétaires, selon les points de vue qu'il leur fallait quantifier (coût de la prévention des accidents, contribution des individus à la richesse nationale, etc. Très utilitariste et sansdoute assez "décoiffant" !

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