• Peut-on vivre avec le virus ?

     par Pierre Marsal

    29 novembre 2021

     

    Après le variant Delta du virus SARS-CoV-2, voici l’Omicron qui s’annonce. Bientôt l’alphabet grec n’y suffira plus et il faudra en trouver d’autres, arabe (Alif, Bā, Tā...), hébreu (Aleph, Beit, Gimel…) ou autre ! Les informations sur les symptômes qu'il provoque et leur évolution restent encore limitées. Mais il y a lieu d’être, sinon inquiets, du moins très prudents.

    Plus que jamais il faut respecter les gestes-barrières et suivre les consignes de vaccination.

    Cela n’empêche pas de se poser la question du bien-fondé de la politique de vaccination actuelle. Avec cette question provocante : n’est-il pas contreproductif de vacciner en pleine période d’épidémie alors qu’on est en présence d’un virus qui mute rapidement ?

    La protéine S de ce variant comporte 32 changements ce qui est un record (le Delta n’en avait qu’une dizaine). Autant de chances pour lui de vaincre les barrières que les actuels vaccins opposent à ses congénères. Si toutes ces mutations n'influencent pas le comportement du virus, en revanche, il en est certaines, déjà présentes chez des variants précédents, qui ont des effets connus sur l'échappement du système immunitaire et sur l'action des vaccins. Mais pour l’instant toutes ces mutations ne signifient pas que le variant Omicron provoque une forme plus sévère de la Covid-19.

    En fait, c’était attendu, car les virus ont des ADN (ou des ARN comme dans le cas des coronavirus) ultra-simplifiés qui ont peu de mécanismes de « contrôle de qualité » assurant la correction des « erreurs » de réplication. Bien que la grande majorité des mutations du génome de ces virus soient sans effet notable (« silencieuses »), leur multiplication et leur vitesse de réplication rendaient fort prévisible l’émergence de souches plus virulentes1.

    Dans un tweet de début août dernier, le biologiste Pierre Sonigo, regrettait l’insuffisance de notre enseignement sur les mécanismes évolutifs. Il expliquait que les virus optimisent leur survie/reproduction en temps réel par rapport aux pressions de sélection darwinienne existante…. Ce qui est nouveau pour lui aujourd’hui par rapport à la situation émergente de 2020, c’est la montée de l’immunité qui contraint le virus au contournement afin de persévérer dans son être (comme aurait pu le dire Spinoza) ou à être porté par l’élan vital (pour suivre Bergson) 2

    Il ne faudrait pas croire qu’il y ait là la moindre intentionnalité, la moindre prise de conscience. En fait tout se passe « comme si ». Un exemple plus trivial peut nous faire prendre conscience du phénomène : l’exemple de la fuite d’eau. Si elle est colmatée dès son apparition, tout se passe bien. Et encore mieux si l’on a pris des mesures préventives au préalable. Dès qu’elle se déclenche on peut toujours essayer de lui barrer la route en opposant des barrages, mais ceux-ci peuvent être contournés. Le flux de liquide devenant de plus en plus important avec le temps, à défaut de colmatage total, les barrages seront de plus en plus conséquents et nombreux. Et plus on opposera de barrages, plus le flux sera dévastateur lorsque ceux-ci seront contournés. Voilà ce qui se passe lorsqu’on essaie de barrer la route à un vaccin émergent : ou bien on l’éradique, ou bien on apprend à vivre avec.

    Dans le cas qui nous occupe, il était bien évident que, si une proportion considérable de la population mondiale n’était pas vaccinée 3, rien ne pouvait arrêter son développement. Il faut bien insister sur l’adjectif « mondiale », ce n’est même pas un devoir de solidarité, c’est aussi une exigence d’efficacité. Les pays à faible taux de vaccination deviennent des réservoirs à mutants.

    Dans la situation actuelle, il reste à espérer que l’actuel mutant et les futurs – car il y en aura d’autres – ne feront pas preuve d’un pouvoir létal supérieur. C’est d’ailleurs souvent le cas lorsque surgissent de nouvelles maladies de ce type : les virus devenus autochtones finissent par faire partie du paysage sanitaire. Il faudra s’y habituer, comme à la grippe saisonnière.

     

    P. S. (30/11/2021) : j’apprends, un peu tardivement, que, dans un communiqué du 28 novembre, l’OMS appelle instamment tous les pays à laisser les frontières ouvertes. En effet, comme il a été écrit ci-dessus, il est impossible d’empêcher le virus de circuler. La fermeture des frontières produirait des effets très néfastes : pénalisation des pays comme l’Afrique du Sud ont le courage de la transparence, incitation des autres pays à dissimuler une information indispensable à la meilleure connaissance de la pandémie et des moyens d’y porter remède. En conséquence l’OMS a décidé de renforcer les moyens mis au service des pays Africains.

     

    1 Les premières études ont montré que la population virale du SARS-CoV-2 opérait en moyenne une substitution tous les 11 jours, un record pour un virus.

    2 Ceci a également été expliqué dans un autre article paru sur Internet :

    https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/vaccin-anti-covid-taux-vaccination-eleve-peut-paradoxalement-favoriser-emergence-variants-resistants-92812/?utm_source=alerte&utm_medium=fs&utm_campaign=emailing&utm_content=2021-08-04-#xtor=EPR-57-[ALERTE]-20210804

    3 A condition que soit prouvée l’efficacité du vaccin, ce qui semble bien être le cas.

     

     

    « Trop chère énergie ?Dans le concert des nations, y a t-il des Bons et des Méchants ? »

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